20110828

Le Grand Cahier

"Chère tante Agota,

Je viens de terminer votre dernier roman le Grand Cahier, et les dernières phrases résonnent encore à mes oreilles "Oui, le moyen de traverser la frontière, c'est de faire passer quelqu'un devant soi". J'en suis encore tout remué.

Ma bien chère tante; quel grand roman nous livrez-vous là. Tant de souffrances, d'horreurs et de belles choses en si peu de mots. Econome vous êtes mais jamais avare. Quand j'entends le babillage des poseurs de proses de notre époque,  je ne peux que louer votre talent et votre génie. Oui, tante Agota du génie. Je pèse mes mots car j'en ai lu des livres, mais aucun ne m'aura procuré autant de plaisir en aussi peu de temps.



Pas une overdose mais une immense vague qui vous submerge, car voyez vous chez tante, j'ai commencé votre roman hier soir. Dès le premier paragraphe, je savais que je ne pourrais pas m'arrêter de vous lire, alors, j'ai posé le roman à côté de mon lit.

Je l'ai repris ce matin et l'ai lu d'une seule traite. Je n'ai plus fait cela depuis longtemps. —Depuis Michel H. je crois. Enfin, depuis longtemps.

Chère Agota, le temps passe vite, mais promettez-moi de revenir nous voir bien vite. Vous nous manquez déjà.

Votre bien aimé neveu et plus fidèle lecteur.

J."

Voilà la lettre que j'aurai pu écrire, si Agota Kristof avait été ma tante, si j'avais été son neveu , si j'avais été moins sot ou mieux informé sur qui était Agota Kristof.

Dans ma bêtise, car je peux ici parler de bêtise, j'ai toujours pensé que derrière ces sept syllabes se cachait un pasticheur, un écrivaillon qui avait pri un pseudonyme qui sonnait (trop) comme Agatha Christie, et cette tante là, je n'en voulais pas. J'ai refusé Agota à cause d'Agata.

L'erreur est réparée 20 ans plus tard mais, entre temps, Agota à rejoint Agatha.

Roman coup-de-poing: il balaye tout sur son passage. Difficile de reprendre autre chose après ça. Je vais attendre quelques jours, laisser reposer un peu et reprendre plus tard.




20110819

Stupeur et Tremblements

Même si cette petite escapade m'a arraché des cris de douleurs, je suis bien content de l'avoir faite. Quand j'y repense, cela aurait très bien pu se terminer en petit drame...




J'ai passé l'après-midi à farfouiller dans la région de Gex pour retrouver les traces, dans l'ancienne ligne de chemin de fer, qui devaient faire la liaison avec Bellegarde. 


C'est une vision de mon enfance : La Micheline ou Flèche Rouge que je voyais passer au loin, dans la plaine, lorsque je passais ses longs après-midis dans le Jura chez mon parrain.


Cette ligne existe toujours mais elle est plus ou moins abandonnée. Disons plus que moins, et j'ai failli en faire l'expérience aujourd'hui. 


Du côté de Gex, la ligne est complètement désaffectée. Elle se perd dans la forêt, et les photos que j'ai prisent donnent exactement l'ambiance décadente que je recherche. 


J'ai longé les rails sur plusieurs kilomètres et toujours ce mélange métal/végétation qui me fascine. J'y vois la lutte pour la survie, les traces de l'homme recouvert par la végétation qui prend—inexorablement—le dessus.


En me rapprochant du CERN, j'ai constaté que l'état de la ligne s'améliorait. J'ai garé la voiture et j'ai longé la voie. J'ai pris de belles photos des ballastes et des barrières qui bordent la voie. J'étais un peu angoissé à l'idée que parmi ces pierres se cachaient—peut-être—des hôtes inamicaux.


J'ai entendu, au loin, le sifflet d'un train. Je me suis dit qu'il devait y avoir une ligne de RER pas loin. Perdu dans mes contemplations et mes prises de vues, je n'y ai plus prêté attention. Puis, j'ai entendu un bruit sourd et continue: comme un roulement. Un son plus fort cette fois et qui semblait se rapprocher. 


Je me suis demandé si des trains circulaient sur cette voie. Réflexion faite, le segment de cette voie me paraissait moins endommagée que le tronçon précédent quand bien même une ballaste sur deux était pourrie. 


J'en étais là, dans mes réflexions, lorsque j'ai vu à 50m de moi...un train. Oh, il ne circulait pas bien vite, 20km toute au plus, mais quelle vision d'horreur pour moi qui me croyait seul au monde, dans un imaginaire bien Tarkovskien, perdu au fin fond de la Sibérie longeant les rails qui mènent à la zone interdite. 


Et voilà que cette locomotive me ramène à la réalité: le conducteur à actionné, une nouvelle fois, le sifflet ce qui a fini de me tirer de ma rêverie. J'en étais quitte pour ma peur. 


J'ai fait un signe au conducteur. Il m'a répondu. Un bon vieux train de marchandise qui se dirige probablement dans l'usine que j'ai vu avant.


Cette petite frayeur m'a fait du bien, m'a fouetté le sang.

La Honte

Mon père disait souvent: “un moment de honte est vite passé”. La honte est un sentiment bizarre. On dit souvent: "j'ai honte" ou: "tu nous fais honte", mais aussi: "ça fait honte à voir" et plus récemment dans la bouche des jeunes: "c'est la honte".

La honte, c'est aussi ce que les titres des journaux montrent dans des images "chocs" de bidonvilles, de décharges publiques ou de clochards—mais, uniquement lorsqu'elles sont prisent dans nos régions. Ailleurs, sa passe mais à Genève, c'est la honte.

La honte, pour qui d'ailleurs ? Pourquoi, on s'imagine les pauvres, les ordures,etc? Mais, qui a honte au juste? Le journaliste qui écrit l'article ? Sûrement pas. L'éditorialiste ou l'actionnaire du magazine? Evidemment, non. Mais, qui alors ? Nous autres lecteurs ?

La honte est en sentiment qu'on éprouve par apport aux autres. Pas de témoin, pas de honte. Un jour, j'ai été malade. Une dysenterie carabinée. J'allais prendre mon métro aux halles lorsque j'ai senti un liquide chaud me couler entre les jambes. J'ai regagné mon appartement en rasant les murs. Mon honneur était sauf, car personne ne m'a vu. Mais la simple évocation de ce qui m'arriva, ce jour là, suffit encore à me faire trembler.

Et si quelqu'un m'avait vu ? Avait-il remarqué quelque chose?

Nous éprouvons de la honte dans différentes temporalités : passé, présent et futur.

Vous vous êtes oublié un jour à l'école. Vou suppliez la  maîtresse de vous laisser allez au WC, mais elle refuse: "les besoins c'est pendant les récréations, pas avant ni après". Votre voisin de table signale à la classe entière la présence d'une flaque sous votre chaise. C'est le rire général. Le sentiment qui vous gagne, à ce moment, est le même que celui que vous éprouvez quarante ans plus tard en y repensant. Le sentiment est intact: la honte se conserve longtemps et bien mieux que l'amour.

Vous êtes au restaurant et vous vous disputez avec votre fiancée: elle vous gifle et vous traite d'enflure en quittant la table. Vous restez immobile n'osant pas affronter les regards des gens. La honte vous submerge.

Vous voyagez en train et vous vous laissez aller à vos pensées. Vous répétez le discours que vous aller prononcer ce soir. A ce moment précis, vous revient en mémoire le dernier discours que vous avez prononcé pour le départ de votre ancien chef: le long silence qui avait ponctué la fin de votre discours, les regards attérés de l'assistance vous glace encore le sang et la perspective du discours à venir démultiplie votre angoisse à l'infini.

La honte est le seul sentiment qui s'exprime simultanément en trois dimensions: passé/présent/futur.

Un noment de honte est vite passé, certes, mais il ne s'oublie jamais.



20110818

Sur la Laideur

C'est certainement l'avenue la plus laide et la plus insignifiante au monde. Je m'imagine le voyageur qui—pour la première fois—foule le sol de notre pays et qui aurait eu la sotte idée d'arriver par là, par cette frontière au lieu d'une autre.

La première impression, comme dans beaucoup de domaines, est déterminante. Le premier rendez-vous fixe un certain nombre de paramètres qu'il sera plus ou moins difficile de modifier par la suite.

Tous le monde se souvient de la première rencontre avec l'être aimé: cette manière si particulière qu'on les personnes avec qui vous partagerez d'autres moments de se singularités, de se démarquer des autres. La première impression, bonne ou mauvaise, vous marque et détermine déjà les rapports que vous entretiendrez plus tard.

Un tel est bien mis  et charme son entourage. Un tel est négligé et titube. Une autre ne cesse de regarder son reflet dans les miroir. Une autre vous dévisage et se jette sur vous en vous couvrant de baisers.

Je me rappelle de mes arrivées à: Las Vegas, Paris, New York et, ceci,  comme si c'était hier. Une impression nette et précise : je vois des lueurs rouges et jaunes au loin dans la nuit. Au détour d'un virage, je découvre Las Vegas. La ville brûle de milles feux. La route qui serpente vous amène lentement au coeur du vice.

C'est ce que j'ai pensé en arrivant à Las Vegas: après le feu du désert celui du vice et de la nuit.

En arrivant à Genève par la douane de Prévessin-Moëns, on a l'impression d'arriver nulle part. Les douaniers français ne sont pas là; les suisses non plus.

Sur la gauche, on aperçoit le CERN au centre. En enchevêtrement: des câbles électriques et de lignes à haute-tension. Sur la droite: des bâtiments administratifs, des stations d'essences et des parkings pour voitures.

L'ensemble est d'une laideur affligeante, et ce n'est pas la vision d'un mont Môle aperçu fugitivement entre deux caténaires qui change grand chose au problème.

Le problème c'est l'ensemble. Toutes ces constructions sont laides. Le CERN est laid, et ce n'est pas le bâtiment futuriste fabriqué pour fêter l'an 2000 qui donne de la splendeur à ce lieu. Non, cette avenue est triste et laide.

Le tram 18: fleuron de la technologie Canadienne qui propulse les usagers en direction du centre-ville. Ah tenez-vous bien, plus de 20km !!! Ceci vient donner une note comique à ce paysage désolant. Comique et totalement anachronique. Au XXIème siècle— à l'heure où toutes les capitales s'équipent de métros, de trains sans pilotes, de véhicules électriques léger et rapides—nous, nous avons un tram modèle 1900.
—Même Lausanne à son métro...

Le voyageur qui aurait commis l'imprudence de venir en Suisse et de choisir cette douane, plutôt qu'une autre, aura une bien piètre image de notre pays. Il ne pourra guère se consoler en regardant le spectacle affligeant à travers les vitres du tram. Une longue suite d'immeubles, tous aussi laids les uns que les autres, construits par des architectes maternés au lait suisse. —Un lait de qualité mais qui ne donne aucune imagination, aucune créativité.

Je me console en me disant que celui qui arrivera depuis la douane de Versonnet ou de Monniaz, lui, sera sauvé...

20110813

Tel Attila


Tel Attila,
Tel Othello,
Tu te noircis.
Dans quoi te mires-tu?
Dans quel étang?


À l'avenir,
Laisse venir,
Laisse le vent du soir décider.


Qu'on m'accuse et qu'on me pendouille mais, ce soir, j'ai effacé Alain Bashung et Serge Gainsbourg de mon iphone. Je tire un trait sur cette période. Je n'ai gardé que l'album Mélodie de Serge et Bleu Pétrole d'Alain—en cas d'urgence, je pourrai toujours briser la glace.


Exit Serge, Alain, CocoRosie, Syd Matter (sauf l'originale) et puis deux ou trois autres trucs mineurs. 


50% d'espace libéré...ce n'est pas rien: un peu de honte qui monte, un sentiment d'abandon. Non, je n'abandonne pas mes idoles: je déplace mon champ d'investigation.



















Enfin du Neuf !

Mais où étais-je passé ces dix dernières années ? Sur mars ? Sur vénus, plus probablement, me connaissant. Déconnecté. Centré sur autre chose. Les merveilles que j'ai découvert m'ont privé de mes yeux (et de mes oreilles). Je vois à nouveau. Je vois du neuf. 


Dix ans de Bashung, de Gainsbourg, de JLG ça suffit. Je vais faire une parenthèse. 


C'est comme ça et pas autrement disais-je à je ne sais plus qui—à Arles.


Au grès du vent, me laisser aller. N'ayons pas peur du vide. Se lâcher, c'est sûrement mourir un peu. Rester, c'est mourir sûrement. 


Me voilà prêt. Au grès du Net j'ai trouvé :


://GhostPoet
://Squareusher
://Owniy Sigoma
://Obenawa
://Lefto (DJ)




Un label: Brownswood. Une plate-forme d'échange de musique: Soundcloud où j'ai retrouvé Goo d'ailleurs.


Des napes musicales, de la poésie, du groove, de la dance (quoi moi écouter de la dance? Oui, mais de la bonne dance).


J'ai senti les premiers signes du mal lorsque je suis sorti dansé un soir. Décalage complet. Attention, il ne faut pas se méprendre: je ne renie rien de ce que j'ai dit sur la musique actuelle. Je trouve quand même que 100% du top 50, c'est de la grosse m., que le Hip-Hop actuel, c'est naze, et que le R&B c'est de la soupe à deux balles. Je dis simplement qu'il y a du bon dans la nouveauté, mais que je ne la connaissait pas. 


Celui qui s'entête à forcément raison (à force de lire l'annuaire, on doit y trouver son compte), mais il y a d'autres moyens, d'autres voies.


Enfin, j'explore on verra ensuite. J'aime l'idée de sensations nouvelles. Sortir du cercle.


Bon, me voilà reconnecté avec l'oreille. Pour l'oeil, on verra plus tard.